En 1953, mon père doit encore repartir, et
cette fois c'est l'Indochine.
Je m'imagine que cela a été un déchirement pour ma mère, car mon frère Marc n'avait que 1 ans, moi 6 ans, elle devait cette fois-ci rester toute seule à Oran.
Heureusement qu'elle était chez mes grands-parents maternels. Je présume que ces deux ans avec eux ont été quand même plus courts, puisque c'était la durée du séjour de mon père loin des siens.
Voici ce qu'il nous raconta dans sa première lettre:
Quand je suis arrivé à Saïgon, je fus bien sur très bien reçu par toute la troupe et ils me désignèrent ma chambrée. J'y allai donc, posai mes affaires sur mon lit, et allai au lavabo me mettre de l'eau sur le visage pour me rafraîchir.
Et à ce moment la j'eu comme un malaise, un trouble m'envahi, je ne sais quoi, ce petit quelque chose qui dérange. Je regardai autour de la pièce, rien, et tout à coup je baissai la tête.
Et là, je crois que mes entrailles se sont tellement crispées que j'ai été au bord de l'évanouissement de peur. En effet, dessous le lavabo, il y avait là un énorme serpent, enroulé sous l'évier, sûrement pour se préserver un peu de fraîcheur. Moi, à pas lents je reculai jusqu'à la porte et je crois que je n'ai jamais autant courut aussi vite de ma vie. Je me mis a hurler "il y a un serpent !!!! il y a un serpent !!!!" et je voyais les personnes qui m'avaient accueilli se fendre la pêche en deux. Et plus ils riaient, plus cela me mettait en rogne, "comment il y a un serpent dans la chambre et vous riez, vous avez du culot, allez le sortir de là, faites ce que vous voulez mais sortez le !!!!".
Les gars me prirent par le bras et me dirent : "du calme venez voir avec nous" et il me ramenèrent dans la chambrée.
Un soldat vint vers le serpent qui était un python, le déroula doucement, et le mit autour de son cou, devant mon regard médusé. Ils me dirent " je vous présente Joseph, la mascotte du régiment".
Voilà comment se commença mon séjour en Indochine.